Futurisme en grande pompe : crac, pouah, boum ! par Michaël Moretti

Les Incitations

04 déc.
2008

Futurisme en grande pompe : crac, pouah, boum ! par Michaël Moretti

  • Partager sur Facebook
« Le Futurisme à Paris. Une avant-garde explosive » succède au Centre Pompidou à l'excellente expo Dada dirigée par Lebon. Prétexte : le centenaire de la publication du Manifeste du futurisme de Marinetti à la une du Figaro le 20 février 1909.
La scénographie est censée évoquer les villes peintes par des artistes futuristes : fumeux. Passons. Taille : petite - isthme. Triste explosante fixe : formol. Passons.

Le discours ambigu de l'attitude du futurisme face au cubisme est incompréhensible. Par exemple le Manifeste stipule : « Nous exigeons, pour dix ans, la suppression totale du nu en peinture ». Pourquoi un tableau présente au centre trois baigneuses nues façon Cézanne et Picasso (Les Demoiselles d'Avignon) ? L'histoire de l'art simplifie. Au point que l'influence de Marey et Muybridge sur les œuvres futuristes n'est indiquée nulle part. Passons.

P. Beurard-Valdoye a raison : le lien avec le fascisme, ou ses prémices (irrédentisme, nationalisme, éloge de la guerre, émergence de l'homme nouveau, etc.), n'est mentionné à aucun moment ni chez les futuristes italiens ni chez Ezra Pound. Par contre, sans contextualisation philosophique et historique, le Manifeste futuriste de la luxure de Valentine Saint-Point vente les bienfaits du viol : ìLa luxure est une force ! Vive le viol des vaincus !!" ! En Europe, il n'y a pas si longtemps, les serbes violaient sciemment des musulmanes kosovares, sur fond de bataille duchamp des merles ... Passons.

Jeff Mills, dj historique de Detroit, ville d'industrie automobile, se recycle vers des champs dits plus « légitimes ». Son installation sur trois écrans est artistiquement indigente : collages d'images faciles, son peu travaillé, rapport éloigné au futurisme. Faut faire jeun's ! Ni fait ni à faire. Passons.
Par contre, rien sur la poésie sonore de Marinetti et Russolo. Les simultanéistes (Voirol, Divoire, Barzun, etc.) œuvraient au Théâtre de l'œuvre : pas un mot ! Rien sur le zaoum chez les cubo-futuristes russes. Rappel : ils se moquaient littéralement du ridicule Marinetti lors de sa venue en Russie. Passons.

Rien sur la typographie. Les Mots en liberté futuristes ? A l'exposition Villeglé d'à côté, même étage ! Passons. Aucun extrait de film. Un cycle cinéma est toutefois prévu séparément. Passons. Rien sur l'architecture non plus. Passons.

Si la Fillette courant sur le balcon de G. Balla et Nu descendant l'escalier de M. Duchamp sont tout de même présents, Formes uniques dans la continuité de l'espace d'U. Boccioni manque cruellement. Aux oubliettes F. Depero. Compléter la reconstitution de l'expo consacrée aux peintres futuristes italiens organisée en 1912 à la galerie Bernheim-jeune&Cie avec des photos en noir et blanc n'est pas du meilleur goût. Passons. Découvertes perso : Félix del Marle (existe-t-il réellement un futurisme français ?) ; Percy Wyndham Lewis (Grande-Bretagne) ; les œuvres du Musée d'art contemporain de Thessalonique. Bonheur de retrouver le Cheval majeur de Duchamp-Villon, hélas pas version bronze.

Dommage que Giovanni Lista soit dans cette galère. Le même qui indiquait justement dans Poésure et Peintrie que Sonia Delaunay ne faisait qu'illustrer Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France de Cendrars, ici dépliée. Au total, l'exposition Le Futurisme à Paris est surréaliste !