Ce qui devait être fait (What needed to be done) par Michael Foldes

Les Poèmes et Fictions, poésie contemporaine

Ce qui devait être fait (What needed to be done) par Michael Foldes

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Quand mon père est mort j’ai mis

mes vêtements de tous les jours

et j’ai attendu avec ma

 mère que l’équipe du crématorium

vienne et emporte son corps,

raide mais apaisé

tiédi mais pas encore glacé.

Quand mon père est mort

j’ai retiré la flèche

au dessous de son aile

j’ai vu le sang couler

sur ses plumes rouges

avant qu’il ne s’envole

s’agitant

parce qu’il ne pouvait plus atteindre

ni chercher plus haut

un endroit plus sûr

et j’ai pleuré sur lui

et sur moi.

 Quand mon père est mort

 j’ai appuyé sur la gâchette

qui propulsa le tir

dans les branches nues

où les moineaux

viennent au printemps

pour se reposer,

et s’abriter.

Quand mon père est mort

 j’ai retiré le crochet

de sa lèvre tendue,

j’ai ouvert son ventre

 j’ai glissé mon doigt

dans la plaie ouverte

 j’ai retiré son cœur

je l’ai moulu encore moite

dans son jus

et j’ai mangé sa chair.

J’ai entendu les tambours d’acier battre

 une fois que mon père était mort,

 je l’ai porté

dans les hautes herbes

j’ai creusé une fosse

peu profonde sous la pluie

je lui ai donné

 les derniers sacrements

et j’ai laissé ses os

sécher.

Quand mon père est mort je vis

son corps touché par trois tirs

roulant à terre sous chacun d’eux

comme s’il voulait

échapper à ce danger

mais le mal était fait

sa viande n’était pas comestible

sa peau, comme sa vie

n’avait plus de valeur.

Quand mon père est mort

son corps monta au paradis

mais je ne sus pas où

son âme partit

sans doute parce que je ne l’avais jamais vue

vivante.

Quand mon père est mort

je vis son corps

sur l’autel

et je sus que son âme

était déjà au paradis.

Quand mon père est mort

ses petits-fils ont creusé

sa tombe.

Quand mon père est mort

les canons ont tirés

les drapeaux ont flotté

les pigeons ont volé

et la nuit porta

des paillettes d’or sur sa robe.

Quand mon père est mort

j’ai coupé des grappes de raisins

et j’ai fait du vin.

Quand mon père est mort

j’ai avancé

sans jamais défaillir.

Quand mon père est mort

j’ai entendu le cœur

sans son renoncement.

Et quand mes pères

sont tous morts

je suis resté

pour nettoyer

tout ce qui devait

être fait

et je l’ai fait

mais comment au juste les années

se sont-elles envolées.
   
Texte original :
   

When my father died I dressed

in the clothes I had on

and waited with my

mother for the crematory staff

to come and take his body,

stiff but no longer sore,

cooling, but not yet cold.

When my father died

I pulled the arrow

from beneath his wing

saw the blood seep

onto his red feathers

before he flew away

skittering along,

 for he could rise

no higher searching

for a safe place,

and I wept for him

and for myself.

When my father died

I pulled the trigger

that sent the shot

into the bare limbs

where sparrows

land in spring,

to rest,

and shelter.

When my father died

I pulled the hook

from his taut lip,

slit his belly,

slid my finger

up his opened gut,

pulled out his heart,

laid it in ground

moist with piss

and ate the flesh.

I heard the steel drum beat once

when my father died,

carried him

to the high grass,

dug a shallow

grave in the rain,

gave him

his last rites

and left his bones

to dry.

When my father died I saw

his body take three shots

rolling away with each

as if leaping out

of harm’s way,

but the damage was done.

his meat was inedible,

his pelt, like his death

of no value.

When my father died

his body went to heaven

but I don’t know where

his soul went

because I didn’t see it

leave.

When my father died

I saw his body

on the altar

and knew his soul

was already in heaven.

When my father died

his grandsons dug

his grave.

When my father died

the cannons fired,

the flags waved,

the doves flew,

and the night wore

sequins on her dress.

When my father died

I cut the grapes

and made the wine.

When my father died

I moved on

but never left.

When my father died

I heard the heart

within give up.

And when my fathers

all had died

I was left

to clean up

what was needed

to be done,

and did,

but how the years

flew by.

 

 

Le commentaire de sitaudis.fr

Traduction Jean-Paul & Lara Gavard-Perret