Alzafarin, extrait de Migas par Olivia Bonnafoux
Des falaises moulues
l’albâtre se fait farine
nuage blanc presque cassé
la pluie géométrique
fissure mon monde
J’aurais voulu alcanzar un accuerdo
mais impossible d’exister en s’accordant aux stries
l’adulescence est un carburant médiocre
je ne serais qu’un imago non fini
Je respire les particules de bâtiments
je réussis enfin à faire entrer le territoire
au centre de mon corps
tousse les décors les pommes de pins
c’est la saison qui chatouille
yeux et narines
bouchés
Les débris dans le saladier
les hélices qui tournent
veillez à ce que la poudre soit toujours granuleuse
le tout à verser dans un moule
je place ensuite la pâte sablée contre mon palais
les bas-reliefs prennent l’empreinte de mon voile
les plafonds à caissons
celle du plancher buccal
La chaleur attire les mouches
en rang de biais dans les couloirs
intérieur extérieur
les ailes en courant
trous d’air mon regard fait la taille
d’une dizaine de moustiques
ma peau est libre
service
Est-ce que l’usucapion s’applique pour les prisonniers ?
Si j’habite paisiblement ma cellule
que l’on me prolonge ma peine
ma patience récompensée
je deviendrai propriétaire
J’ai le doit de fuir si je me liquéfie
les jalousies tolèrent la fraîcheur
mais l’échappatoire n’aurait rien à voir avec une vraie bouffée d’Ebre
Dans la salle des pas perdus
l’eau récoltée dans les alcazabas
provient des proies congelées
gourde de sudation des climats arides
une pensée aux lits gouttières
dans le huis clos
j’explose un podomètre
Tout est polybé
sur l’encadrement des portes
sont suspendus des casse-noix ouverts
je me pensais abritée sous les arches de fer à cheval
mais le mauvais œil me guette
Je me souviens d’un jour de mai où j’ai vu des charpentes
dans les forêts les gardes à vue
arrachaient ceux qui dépassaient
gainage tronc d’arbre
sans chlorophylle et sans écharde
le droit floral sert à tenir les plafonds
La joue sur la jalouse
je suis censée moins étouffer
la perfection des lignes n’apaise pas les troubles
je me tiens
me retiens
au relief forgé
mais tout ce que je vois c’est une trame
les alcázares ont certainement tous été des prisons
yo no lo vi mais je le sais grâce au jardinier
en fouillant nous sommes tombés sur des cadastres
La plâtrée apprivoise les peuple
domestication des modes de vie
la bétonnière est un instrument de pouvoir
elle restaure les motifs à la chaux
Les alcázares sont des résidences de forts
thunée leur façade a deux profils
ses yeux trop maquillés lui jouent des tours
malgré les imposantes décorations
le parallélisme n’est pas respecté
c’est louche
je la vois qui regarde dans deux directions
Les feuilles d’or recouvrent les aspérités
le salon cache sa joie
la tradition est ornementale
dépoussiérer c’est ne pas oublier
peindre parfois
c’est être un peu volage
Faire le ménage est associé à la précarité
mais le plumeau ressemble au pinceau
être voleur n’est jamais un choix
la vengeance n’est pas esthétique
elle est stratégique et composée
régions fragmentées peuple en morceau
les arias les plus fortes sont l’expression d’un chaos
Les châteaux sont des illusions
et pourtant celui-ci sans blé
si réel
Je me souviens du nom
Alzafarin
mais les informations à son propos sont introuvables
le royaume a tout de même laissé des traces d’ergot
vision ou hallucination
son histoire est ruiniforme