La demi-madeleine par Valentin Lehmann
La demi-madeleine, c’est une sorcière qui a mal fini. Au bord d’un sachet de thé, détrempée, il a fallu qu’il y ait une rafale. Et puis elle est passée par la fenêtre, inconsciente, endormie peut-être. C’est le feu qui l’a emportée - le feu comme récidive des voyages qui ne s’arrêtent jamais. En fait, on ne sait pas si elle s’appelait vraiment Madeleine. Ça lui allait bien. En tout cas, elle a expiré une fois pour toute. Comme dissoute dans l’automne et ses fumées et cette eau bouillante de thé. La demi-madeleine, c’est cette main forte et intransigeante qui l’a emmenée. Elle l’a bouffée, personne ne sait quand ça a commencé, c’était comme un fait divers. Il y avait cette partie d’elle encore forte et qui tenait face à l’empoigne. Et il y avait l’autre absoute, sous les coups et sous ces grandes eaux trop chaudes. La demi-madeleine, elle a été emportée d’un coup, comme dans un réacteur d’avion. Et on n’y pouvait rien. En attendant, on la voyait gueuler sur des enfants, ou plutôt leur chuchoter que leur présence était de trop. Au fond, c’est elle qui était de trop. Elle était partie, elle avait disparu.