Faire confiance à la dynamique par Mathieu Brosseau
La mémoire comme horizon du fermé. Il se souvient, il lui apparaît la sensation d'être touché au plus fort quand il souffle et épuise l'étendue de son corps. Incessamment, il se souvient, il se penche sur l'évidence, il ne comprend pas. On lui répète qu'il faut se croire. Ses jambes se croisent et se ferment. D'un mot, il lève le bras. Il se souvient du toucher de son bras. Il le croit lourd et pensif. Il le croit. Il croit que l'horizon avance contre lui. Il se dit : ìet si cela est hier et là-bas", pourquoi dire : ìtu n'es que présence ?" L'absence du monde touche son absence propre. Cela est bien plus sûr que son existence. Les pays qu'il ne visitera jamais portent le même nom que l'étendue de son ombre. Face au soleil. Il est face. Derrière lui, les ombres réunies communiquent. Absolument. Il interroge. Face. Il interroge l'éblouissement. Les absences sont en dialogue, avec la matière des ombres. Derrière. Devant, il considère ses jambes, on lui a appris qu'elles servaient à avancer, à se baisser, à s'élever. A bouger, en somme. Enfin, on le lui a dit. Il ne peut pas marcher. Il s'arrête. Il décompose son mouvement avec la mémoire du pas. Cela n'allant pas de soi. Les lois ne se trouvent pas en lui, il les classe avec les souvenirs, avec ce qu'il en reste. La mémoire comme horizon du fermé. Tout se passe comme si l'absence n'avait pas sa place au monde. Il collectionne les évidences comme autant de souvenirs laissés sur la pierre et les murs. S'il fait silence, il n'y aura pas d'horizon ; s'il le fait, ce sera-là sa seule certitude. Il voit là-bas ce qu'il faut voir... et s'il oublie, il ne peut plus. Il ne peut plus oublier qu'il a jambes et bras et buste et tête. Impossible ! Il conçoit le cercle et ses tangentes, l'horizon est dynamique. On est arrivé comme ça, s'il te plaît, comme une inclusion à l'intérieur de tous les extérieurs. Sous le sens. Il n'y en a qu'un. S'il te prenait l'envie de marcher, c'est ta mémoire - tu t'en souviens ? - qui te marcherait. Pronominal parce que tout revient au centre, toujours, et il faut le savoir. Il y en a un qui avance sans histoire, proche de toute disparition. Il est une armée de figurines. Chacune en son temps. L'évidence est là, comme mémoire. Il joue au cavalier, deux pas en avant, un sur la droite. Il prend la tangente. Tout est si bien fait. Nous n'avons rien à ajouter sinon l'horizon comme projection. Il voit, là-bas, une armée de témoins. Tous lui disent l'évidence : ìtu existes !" Mais, là-bas, il le sait, il n'y a que les fiers représentants du réel à acquérir, quand lui ne fait que prostituer sa mémoire. La tourner dans tous les sens et lui faire prendre la forme des horizons de la forme, tout cela l'amuse. Il faut faire confiance à la dynamique.