Débordement (sans césure) par Bastien Noël
La marée délinée les rives,
Vague après vague.
Les flots gonflés effacent
Les traces définitives,
Les plongent dans le trouble
Des zones bathyades,
Qui brisent la houle
Et expirent en écume,
Vague après vague.
L'onde migre et inonde
Les canaux en crue ;
Les flots réfugiés avancent,
Les courants se délitent,
Tourbillonnent et siphonnent
Les écluses fatiguées
Qui reculent,
Vague après vague
Le cours du delta
Se renverse,
La limite s'effrite,
Le limon remonte et
Reflue dans les sources,
La parole se retourne dans
L'embouchure, à mesure
Que dégainent les cours.
Vague après vague.
Le rivage ne s'enquiert
Guère d'arrêter les eaux ;
La cité défoncée s'affaisse ;
Les digues s'élèvent en murailles,
Des bastions défient la déferlante,
La ville érige une poupe qui
Coupe les flancs des lames
et navigue à l'inverse,
Vague après vague.
Les fluctuations fiduciaires
Sont brassées au grès du ressac ;
Les Formes éternelles
Tombent décloses
De l'éther, puis se fondent,
Perméables à la terre,
En vase communiquante.
Vague après vague.
Vague après vague,
L'inflation de l'infini
Écumant sans cap
Assiège en déluge
Ascendant les
Insulaires inconsolés.
Fluctuac et mergitur,
Un simple facteur de surface,
Et l'infime s'immensifie
Dans l'immanence.