Lignes par Norbert Czarny
Dans le souvenir vivant d'Anne Sarraute
Ligne oblique : la photo publiée par la Quinzaine du 1er octobre montre Anne à son bureau, quelques usuels en fond. Sophie Bassouls a pris l'image de traviole. Anne sourit. C'est le bon moment pour la capter, dans ce cadre qu'est le journal. Un bimensuel de traviole, bricolé sur des planches qui ressemblent à des bureaux, rédigé par des dilettantes, des amateurs, des passionnés.
Un journal debout donc, bien droit.
Ligne horizontale : celle qu'Anne crée, par ses multiples liens, ses réseaux. Elle sait qui fait quoi, qui ne fera pas, qui peut faire. Les très nombreux collaborateurs de la Quinzaine sont alignés dans son agenda électronique. Les auteurs des articles inscrits dans le cahier rempli au feutre rouge ou noir, d'une écriture toute en pleins et déliés, sobre et distinguée.
Lignes de la bibliographie, inscrite de sa main, dans les pages finales du journal. Brèves ces lignes. Aussi neutres que possible. Pas de jugement sur un titre ou sur son auteur. Quelques informations sur le contenu, les précédents ouvrages. Le tout classé selon l'ordre qui sera celui de tous les numéros : on commence par les « écrivains de langue française ». Pas de fantaisie, jamais rien de personnel.
La ligne de la Quinzaine est aussi claire que celle de la bibliographie. Les éreintements sont rares et visent en général les forts. On ne tire pas sur les ambulances qui font ailleurs entendre leurs sirènes. A quoi bon parler de ce lot commun qui fait les palmarès des ventes, les têtes de gondole ou les débats surfaits de pseudo-émissions littéraires ? Quand un livre s'insinue dans la pile de ceux qui pourraient prétendre à recension, Anne tranche : « Ce n'est pas pour nous. » Elle est parfois sévère. Elle est sensible au frelaté, au déjà vu, déjà lu. Un quatrième de couverture lui fait hausser des épaules, ou sourire. On ne s'appelle pas Sarraute sans avoir du tempérament, et du jugement. Insolente, élégante, à rebours de la personne austère qui rédige les notices en biblio.
Ligne... comment définir cette belle silhouette juvénile qui glisse dans l'ombre de Maurice ? J'aime son allure, son caractère, sa désinvolture. Sa capacité à s'étonner du plus banal, du quotidien. Enfantine dans son éclat de rire.Dans l'ombre de Nadeau, donc, elle mène le bal, fait vivre le journal. Elle redresse ce qui marche de travers. Le souci de la ligne, toujours.
Un journal debout donc, bien droit.
Ligne horizontale : celle qu'Anne crée, par ses multiples liens, ses réseaux. Elle sait qui fait quoi, qui ne fera pas, qui peut faire. Les très nombreux collaborateurs de la Quinzaine sont alignés dans son agenda électronique. Les auteurs des articles inscrits dans le cahier rempli au feutre rouge ou noir, d'une écriture toute en pleins et déliés, sobre et distinguée.
Lignes de la bibliographie, inscrite de sa main, dans les pages finales du journal. Brèves ces lignes. Aussi neutres que possible. Pas de jugement sur un titre ou sur son auteur. Quelques informations sur le contenu, les précédents ouvrages. Le tout classé selon l'ordre qui sera celui de tous les numéros : on commence par les « écrivains de langue française ». Pas de fantaisie, jamais rien de personnel.
La ligne de la Quinzaine est aussi claire que celle de la bibliographie. Les éreintements sont rares et visent en général les forts. On ne tire pas sur les ambulances qui font ailleurs entendre leurs sirènes. A quoi bon parler de ce lot commun qui fait les palmarès des ventes, les têtes de gondole ou les débats surfaits de pseudo-émissions littéraires ? Quand un livre s'insinue dans la pile de ceux qui pourraient prétendre à recension, Anne tranche : « Ce n'est pas pour nous. » Elle est parfois sévère. Elle est sensible au frelaté, au déjà vu, déjà lu. Un quatrième de couverture lui fait hausser des épaules, ou sourire. On ne s'appelle pas Sarraute sans avoir du tempérament, et du jugement. Insolente, élégante, à rebours de la personne austère qui rédige les notices en biblio.
Ligne... comment définir cette belle silhouette juvénile qui glisse dans l'ombre de Maurice ? J'aime son allure, son caractère, sa désinvolture. Sa capacité à s'étonner du plus banal, du quotidien. Enfantine dans son éclat de rire.Dans l'ombre de Nadeau, donc, elle mène le bal, fait vivre le journal. Elle redresse ce qui marche de travers. Le souci de la ligne, toujours.