31 mars
2006
Albany de Christophe Lamiot Enos
Des pommes et des oranges, Californie-II
En exergue, non une ou deux citations d'Artaud mais un florilège, des salves agencées en fervent manifeste.
Puis un poème simple et sublime, plein d'une mystérieuse sensualité : Party au bord du Lac Cayuga.
Né en 1962, Christophe Lamiot Enos a enseigné pendant 14 ans la littérature française aux USA ; il nous livre ici le second volet d'un long recueil paru chez le même éditeur sous le titre Californie- Des pommes, des oranges-I, livre écrit en un an, il y a presque dix ans et où certains souvenirs datent d'autant, il prend SES temps.
Ce sont souvent des tercets remplis d'enjambements aériens avec une métrique qui affectionne l'impair mais la musicalité n'est en rien verlainienne. Ni la syntaxe, quelquefois latinement travaillée ; l'ordre habituel ou nécessaire des mots est judicieusement touché.
Mais le poète n'est pas enfermé dans les contraintes même impaires impures d'un système et il maîtrise aussi bien la comptine que des formes beaucoup plus complexes, le réglage des sons et rythmes autant que le dispositif visuel. Ses poèmes sont des vues d'une grande fragilité, des vues de voyageur ou d'étranger avec des effets très ténus ; ils semblent taillés pour une lecture silencieuse, recueillie, méditante, une pensée de formation légère (dans tous les sens que recèle cette expression), où le désir scintille de toute son indigence, couleur fraise (cf. le saisissant bijou de la p. 117).
Pas de fascination pour les USA on the road, immersion, art de portraitiste, choses de vie vécue et dite sans lyrisme ; d'où la gravité n'est pas absente, le négatif peut remonter comme dans le magnifique Steve à Milvia (p. 44).
Aujourd'hui plus que jamais, nous avons besoin de la figure de ce poète au registre très étendu (et remarquable essayiste), elle se dessine dans des titres comme Homme rencontré avant la nuit où s'offre...
le sentiment que nous nous comprenons très
profond, science
de ceux qui parlent, parbleu
très peu, mais savent ce que
veut dire un discours à la fin du jour ...
Tout en conservant des données de sa tradition, celle dont la fraîcheur inventive culmine en France avec Apollinaire, la poésie apparemment peu savante de CLE (clé de son nom ?) rivalise avec la photographie et le cinéma, les grands arts actuels de saisie du réel : aussi accessible et immédiatement donnée mais plus parlante. D'où sa force et son avenir.
En exergue, non une ou deux citations d'Artaud mais un florilège, des salves agencées en fervent manifeste.
Puis un poème simple et sublime, plein d'une mystérieuse sensualité : Party au bord du Lac Cayuga.
Né en 1962, Christophe Lamiot Enos a enseigné pendant 14 ans la littérature française aux USA ; il nous livre ici le second volet d'un long recueil paru chez le même éditeur sous le titre Californie- Des pommes, des oranges-I, livre écrit en un an, il y a presque dix ans et où certains souvenirs datent d'autant, il prend SES temps.
Ce sont souvent des tercets remplis d'enjambements aériens avec une métrique qui affectionne l'impair mais la musicalité n'est en rien verlainienne. Ni la syntaxe, quelquefois latinement travaillée ; l'ordre habituel ou nécessaire des mots est judicieusement touché.
Mais le poète n'est pas enfermé dans les contraintes même impaires impures d'un système et il maîtrise aussi bien la comptine que des formes beaucoup plus complexes, le réglage des sons et rythmes autant que le dispositif visuel. Ses poèmes sont des vues d'une grande fragilité, des vues de voyageur ou d'étranger avec des effets très ténus ; ils semblent taillés pour une lecture silencieuse, recueillie, méditante, une pensée de formation légère (dans tous les sens que recèle cette expression), où le désir scintille de toute son indigence, couleur fraise (cf. le saisissant bijou de la p. 117).
Pas de fascination pour les USA on the road, immersion, art de portraitiste, choses de vie vécue et dite sans lyrisme ; d'où la gravité n'est pas absente, le négatif peut remonter comme dans le magnifique Steve à Milvia (p. 44).
Aujourd'hui plus que jamais, nous avons besoin de la figure de ce poète au registre très étendu (et remarquable essayiste), elle se dessine dans des titres comme Homme rencontré avant la nuit où s'offre...
le sentiment que nous nous comprenons très
profond, science
de ceux qui parlent, parbleu
très peu, mais savent ce que
veut dire un discours à la fin du jour ...
Tout en conservant des données de sa tradition, celle dont la fraîcheur inventive culmine en France avec Apollinaire, la poésie apparemment peu savante de CLE (clé de son nom ?) rivalise avec la photographie et le cinéma, les grands arts actuels de saisie du réel : aussi accessible et immédiatement donnée mais plus parlante. D'où sa force et son avenir.