Ecrans d'Erik Wahl et Pierre Lacôte par Cyrille Martinez

Au premier regard  il y a quelque chose d’une poésie visuelle enfantine dans Ecrans d’Érik Wahl et de Pierre Lacôte. On dirait la rencontre du Leo Lionni de Petit-bleu et Petit-jaune et du Jean-François Bory de Sgowefygtom ! Sgowefygtom ! Des compositions graphiques colorées pour nous parler, le titre l’indique, de l’invasion des écrans dans nos vies. Un système de double lecture, horizontale et verticale, montre les lettres qui évoluent comme pour sortir de la page.  La lettre retrouve ici sa force plastique. Pierre Lacôte : « Ne pas oublier que la lettre a été un dessin avant d'être un caractère. L'invention du terme topogramme me paraît le plus adapté à cette disposition spatiale et joviale. Jeu dans l'espace, la lettre reste un élément physique avant d'être un outil mental. Les couleurs primaires, toujours nuancées par les lumières, ont l'avantage d'être simples à désigner, à designer, leurs accords sont les plus toniques, leurs harmonies ont une puissance que la nature nous a servi sur un plateau. » L’ouvrage est de fait hyper stylisé. Maquette dessinée par l’artiste, feuilles au grammage 300 g, pagination à l’encre de brou de noix... « ECRANS TOTAL / SIFFLE DANS NOS TETES » écrit Erik Wahl en clôture du livre. La plus grande sophistication, le plus grand soin apporté à l’objet (livre) pour aller en quelque sorte hors de lui. Tout cela, si l’on ajoute des références à la culture populaire et les sous-textes savants, fabrique une poésie immédiatement puissante et accessible.