Général Instin, anthologie
Sans connaître le nom ni l'œuvre de Patrick Chatelier, on a tous entendu plus ou moins parler du Général Instin car sa créature a proliféré sous différentes formes ou supports depuis 1997 et grâce à de nombreux autres écrivains et artistes.
En voici la première anthologie illustrée accompagnée d'un CD (avec de remarquables interventions sonores de l'artiste Eric Caligaris), présentée ci-dessous par un extrait des pages 7 et 8.
Le même éditeur courageux (Benoît Virot) publie simultanément CLIMAX/ Une fiction, encore ?une œuvre à sept mains qui témoigne de la solidité esthétique et éthique de ce projet, à contre-courant des tendances contemporaines égotistes les plus délétères.
Voir le site http://www.generalinstin.net/
EXTRAIT
Général Instin, c’est d’abord un visage.
Un portrait photographique sur verre, vitrail d’un tombeau que l’on voit au cimetière Montparnasse à Paris, effacé par les ans sous des taches formant d’autres silhouettes et paysages.
Général Instin, c’est l’absence d’un visage. Ou le débordement d’un même visage en figures multiples. L’inconnu de chaque visage qui nous fait face.
Le portrait dilué d’Adolphe Hinstin (1831-1905), humain historique mais oublié de l’Histoire, diminué de son H initial, devient le point de départ et le moteur d’un projet accessible à toutes les approches, à toutes les explorations et ramifications.
Général Instin (projet poétique), c’est la somme de ces regards renouvelés.
Objet transitionnel, apparition / disparition, l’image du vitrail ouvre sur les étendues de la mémoire, sur l’ombre mouvante d’un ancêtre universel.
Général Instin (esquisse de personnage), c’est un être fugace, spectral, soldat errant aux frontières des existences, des genres et des identités, de l’individu et du collectif.
Depuis 1997, débuts du projet, artistes et non-artistes s’emparent de cette pluralité dans une œuvre en cours, toujours sur le point d’advenir en tâtonnements et impasses, dans un corpus fantôme dont l’inachèvement garantit la survivance.
Général Instin (auteur peuple, chef sans tête), c’est l’autorité qui perd ses auteurs, et en les perdant les trouve, peut-être.
Ainsi va la prolifération du GI, dans une geste pseudo- militaire qui est dérive, selon diverses fractales et avatars, sédimentations contextuelles sous forme de performances, écrits, vidéos, objets, postures, bruits, questions, échos, découragements, monuments, bagarres, virtualités, terreurs, tumultes, farces, fuites, machines.
Général Instin (nébuleuse, mouvance), c’est une fabrique multidimensionnelle de déplacements. Inscrite avant tout dans l’interstice, l’infra, l’hybride, l’épiphanie, les hasards.
Général Instin, c’est un mode à la fois majuscule et mineur : tempo, éthique — et peut-être révolutions.