23 mars
2008
Les draps du peintre de Maryline Desbiolles
Impossible de mener une phrase ample, de la dérouler,
impossible d'avoir une phrase allante, un début et une fin,
un dénouement.
Cherchant à saisir l'insaisissable Peintre qu'elle va nommer mais ne nommera pas, Maryline Desbiolles se représente in the working, elle donne à voir ses instruments et ses affres comme les meilleurs artistes et les cinéastes des années 60-70 eurent à cœur de le faire avec cette obsession du dévoilement et ce refus de mentir et de tricher qui les tenaillait.
Le Peintre en question, qui a bel et bien existé, est mort mais pas oublié,que tous les gens du milieu de l'art reconnaîtront sans peine, ce peintre ne ressemblait cependant pas tout à fait à ses pairs : plus roublard sans doute, est-ce parce qu'il fut le seul d'origine ouvrière ? Une marque de noblesse à cette époque, dont il ne chercha pas à profiter. Un rapport trouble à l'argent, à la propriété, à l'œuvre, aux marchands, au milieu. Maryline Desbiolles enquête, révèle, démasque avec l'audace du Truman Capote de In cold blood mais ce faisant et se montrant elle-même au travail, en quête, elle élabore un type, un héros de notre temps : au-delà des artistes qui commencèrent à proliférer, au-delà des militants qui s'engagèrent et de ceux qui firent la route comme Kerouac ou Bouvier, au-delà de ceux qui redécouvrirent la terre à la suite de Thoreau, il y a ce type en proie à la soif, à la Chercherie comme dit Beck qui ne débouche que sur un tableau puis un autre puis un autre :
Et cette perdition est ce qui nous sauve ...
Cela semblait impossible, hors de portée de la conscience moderne trop imprégnée de vérités, pourtant le Héros naît, renaît sous nos yeux durcis et proches, il enseigne, il forme autant qu'il étonne.
Comme dans tous les récents livres de Desbiolles, depuis Primo jusqu'à C'est pourtant pas la guerre , le texte participe de l'enquête et de la quête, il est tendu par le risque et l'audace dans le recueillement des indices mais il les confronte sans faiblir aux images, aux tours et aux liens de la langue : alors les sens miroitent à donner le tournis pour susciter la seule véritable poésie du réel, celle qui nous donne le sentiment exaltant de tout comprendre, du monde et de l'art.
D'où l'émotion très particulière et intense qu'offrent ces lectures, le rythme à la fois haletant et pianissimo qu'elles impriment : un seul extrait ne saurait suffire à en rendre compte mais il permet d'entrevoir ce qui fait que, contrairement à Capote, Maryline Desbiolles fait mieux que survivre comme écrivain à chacune de ses folles entreprises : la puissance de ses aveux et de ses refus.
impossible d'avoir une phrase allante, un début et une fin,
un dénouement.
Cherchant à saisir l'insaisissable Peintre qu'elle va nommer mais ne nommera pas, Maryline Desbiolles se représente in the working, elle donne à voir ses instruments et ses affres comme les meilleurs artistes et les cinéastes des années 60-70 eurent à cœur de le faire avec cette obsession du dévoilement et ce refus de mentir et de tricher qui les tenaillait.
Le Peintre en question, qui a bel et bien existé, est mort mais pas oublié,que tous les gens du milieu de l'art reconnaîtront sans peine, ce peintre ne ressemblait cependant pas tout à fait à ses pairs : plus roublard sans doute, est-ce parce qu'il fut le seul d'origine ouvrière ? Une marque de noblesse à cette époque, dont il ne chercha pas à profiter. Un rapport trouble à l'argent, à la propriété, à l'œuvre, aux marchands, au milieu. Maryline Desbiolles enquête, révèle, démasque avec l'audace du Truman Capote de In cold blood mais ce faisant et se montrant elle-même au travail, en quête, elle élabore un type, un héros de notre temps : au-delà des artistes qui commencèrent à proliférer, au-delà des militants qui s'engagèrent et de ceux qui firent la route comme Kerouac ou Bouvier, au-delà de ceux qui redécouvrirent la terre à la suite de Thoreau, il y a ce type en proie à la soif, à la Chercherie comme dit Beck qui ne débouche que sur un tableau puis un autre puis un autre :
Et cette perdition est ce qui nous sauve ...
Cela semblait impossible, hors de portée de la conscience moderne trop imprégnée de vérités, pourtant le Héros naît, renaît sous nos yeux durcis et proches, il enseigne, il forme autant qu'il étonne.
Comme dans tous les récents livres de Desbiolles, depuis Primo jusqu'à C'est pourtant pas la guerre , le texte participe de l'enquête et de la quête, il est tendu par le risque et l'audace dans le recueillement des indices mais il les confronte sans faiblir aux images, aux tours et aux liens de la langue : alors les sens miroitent à donner le tournis pour susciter la seule véritable poésie du réel, celle qui nous donne le sentiment exaltant de tout comprendre, du monde et de l'art.
D'où l'émotion très particulière et intense qu'offrent ces lectures, le rythme à la fois haletant et pianissimo qu'elles impriment : un seul extrait ne saurait suffire à en rendre compte mais il permet d'entrevoir ce qui fait que, contrairement à Capote, Maryline Desbiolles fait mieux que survivre comme écrivain à chacune de ses folles entreprises : la puissance de ses aveux et de ses refus.