Pierres noyées de Geoffrey Squires
Avec ce livre dont le titre original est Drowned Stones, après Sans titre et Paysages et silences, François Heubourg continue de traduire et de nous faire découvrir ce poète d'origine irlandaise, né en 1942.
Ce fut son premier recueil publié en 1975, remarqué pour son innovation formelle et son refus de la poésie lyrique irlandaise de l'époque.
Le poème ci-dessous (pages 78-79), suivi de sa traduction nous semble parfaitement adapté à ces jours attristants de la mi-novembre 2015.
Darkness has set us adrift again
without our knowing it we have become
children of the early morning tide
while we lay and dreamed, the night
slipped us our moorings
we have been offered immortality
but we prefer to take our chance
out of homesickness perhaps
or out of pride, or fear
of another Troy
yesterday I thought I saw again
behind me on the horizon smoke
from the burning city and a vision of
my son praying, washing his hands
in the grey surf
L’obscurité nous a mis à la dérive encore
sans que nous le sachions nous étions devenus
enfants de la marée matinale
alors que nous étions couchés et rêvions, la nuit
a largué nos amarres
on nous a offert l’immortalité
mais nous préférons tenter notre chance
par mal du pays peut-être
ou par fierté, ou par peur
d’une nouvelle Troie
derrière moi dans l’horizon la fumée
d’une cité en flammes et la vision de
mon fils priant, lavant ses mains
dans les vagues grises