Quarante phrases pour P.O.L, lecture pataphysique par Brice Liaud
- Partager sur :
- Partager sur Facebook
C’est un livre qui n’a jusqu’à présent pas fait parler de lui, bien que paru chez un éditeur de renom dont chacun des livres est attendu avec impatience. Je me décide à écrire considérant le fait que je prends tous les risques en m’exprimant le premier. le petit mot à l’encre grise au bas de la quatrième de couverture interroge : « Ce livre vous est offert par les éditions P.O.L ». Ceci d’inouï : les éditions péöelle qui distribuent des livres gratis ?! La nouvelle va faire grand bruit : j’en connais qui vont être content.e.s ! Je lis les lignes du dessus. Le résumé tient en une seule phrase : « Faire un roman de toutes les premières phrases de tous les livres publiés depuis 40 ans aux éditions P.O.L, créées en 1983 par Paul Otchakovsky-Laurens. » …confiance dans ce programme ? Si on avait dû imaginer un livre idéal, un livre qui aurait été fait pour me plaire, on n’aurait sans doute pas fait mieux. Je retourne le petit volume — un dos-carré-collé, car on ne distribue pas de cousu gratuitement, n’exagérons rien. On trouve en titre : « La Première phrase », sous-titre « 1983-2023 ». On est prévenu ! Pourquoi donc ce roman n’a-t-il pas fait parler de lui ? Le roman, le roman… La question du genre littéraire est posée. Je dois dire que rassembler, comme l’indique la couverture, « Quarante ans de littérature » en un livre est un défi ambitieux ! Elle doit être dure à trouver l’intrigue ! Le cadre, le dispositif, le ton, le héros… quel prénom ? Jérôme, Simon, Catherine, Paul, Jesper, Valery, Victor, Ann ou René …? Quelques possibilités parmi d’autres… « La première phrase avec un guillemet ouvrant, suggérant le dialogue ? » Depuis quand n’ai-je pas lu de dialogue ? La dernière fois ce devait être dans Mémoire. « Que de ruptures dans ce roman ready-made ! » Majesté dans un coin, vacarme dans l’autre, durite-voiture-boum et sexe dans le train de nuit, équation puis fauteuil, « qui n’y aurait songé ? » ! Mélikian, Alain, Grand Roi, Marie, Wallance, Marlowe et Goethe, Elliott et Johannes, Marie-Renée, Ovide. À volonté les personnages. Trois mille fois plus que dans un roman classique. 18808888 1151 % même ! Au moins. J’ai quelques impressions de déjà lu. Le résultat obscur fait bien sûr penser à Finnegans wake, même si je reconnais çà et là certaines écritures (Novarina, Doppelt, Mémoire…) Ça n’est pas comme si j’avais tout lu, même si je connais certain noms du catalogue. Tu penses bien qu’en plus je les ai comptés ! Les auteurs sont au nombre, sauf erreur, de 308. On imagine mal le chantier qu’une telle collaboration doit engendrer. Entre toutes ces écritures si singulières qu’est-ce qui se dégage, qu’est-ce qui les rassemble ? Fin de l’unité de lieu, de l’unité de temps, de l’unité d’action à coup sûr. Toni, Florence, Victor, Homère, Anthony, Clint, Clémence, Damiano, Marguerite, Pierre… Vous toutes et tous, les personnages et vos auteurices, je m’adresse maintenant à vous. Avec les autres lecteurices nous vous disons, au nom de la littérature : merci !