Les larmes de Spinoza de Pascal Commère par Augustin Diaz

Les Parutions

29 mars
2010

Les larmes de Spinoza de Pascal Commère par Augustin Diaz

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Dans AU BIC ROUGE, la nouvelle précédant l'avant-dernière de ce livre qui en compte sept, l'auteur évoque l'intrusion brutale de la poésie dans sa vie. Il s'agit moins de la naissance d'une vocation que de l'ouverture d'une béance dans la langue, sous le signe éclatant d'une faute.
Le récit s'ouvre sur un Puis, comme s'il avait toujours déjà commencé : Pascal Commère l'a affirmé plusieurs fois, chaque récit qu'il offre est un fragment du grand livre refusé, 34 fois par des éditeurs. Et il affiche une couleur, celle de Noël, qu'on retrouvera sous une autre forme, négative, dans les tout derniers mots du texte.
Deux récits se croisent en un même temps et lieu, celui d'une initiation à la Poésie par un maître distant et celui du surgissement de la mort, à travers la frêle figure d'une écolière qui vient de perdre sa mère.
Du premier, il est écrit qu'il nommait, sans prélude aucun ni précautions verbales d'aucune sorte, des choses aussi brutales ...
Je me dois de prononcer son prénom, Michèle
, affirme Commère à propos de la seconde, Un prénom qui à la différence d'autres plus illustres ... n'annonçait rien, il faut le dire
Rien mais ce rien appelle à tronquer l'habituel vocable de mère pour un autre.
Au point crucial d'intersection entre les deux récits, le regard de Michèle, il en a la conviction, croise celui du narrateur.
Avant d'autres noms propres auront été avancés, celui de Baudelaire et celui de Francis Carco, un autre aura été tu : le patronyme grossier du juge du procès des Fleurs du mal... tout y était, c'est pourquoi, il n'est pas impossible d'entendre l'écho d'un autre nom propre, celui d'Aupick, dans le titre qui reprend les derniers mots du livre : le patronyme du beau-père haï de Baudelaire.
Une signature pour une autre, LES NOMS DITS, les noms comme autant de fantômes invoqués, remplacés ou chassés, cela n'effraie pas celui qui, sous le nom de Commère, écrit en lien avec un père mort.
Les récits de ce grand poète sont de plus en plus brefs et apparemment simples, comme en témoigne Noël hiver, publié en même temps chez le même éditeur (cf. la lecture qu'en donne Pierre Le Pillouër dans 30 ans, 30 auteurs, l'ouvrage publié par le CNL à l'occasion du Salon du Livre) ; le plaisir qu'ils donnent au lecteur est si fort qu'ils suscitent aussi un violent et vain désir d'en mettre à jour les ressorts cachés.
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