À l'article de la mort baroque de Hervé Bauer par Jean-Paul Gavard-Perret
Hervé Bauer inscrit une étrange poésie du réel selon une forme de « narration » dans un temps où la rapidité de lecture impose la forme la plus ramassée qui soit. Il n’y a de place ici ni pour colis fichés ni pour la verroterie sauf à y voir débarouler un éléphant. Bauer tente - simplement - et tant que faire se peut - l’évaporation des idées noires afin de nous amarrer à celle plus claires du lendemain matin : même lorsqu’il bâille saisi d’une « éternelle insolation »
Exit les morts emphatiques et les marmoréennes figures : la chair exulte bien que, seule, la vacance impose sa « gloire solaire ». Mais n’est-ce pas la manière qu'a la littérature de lutter contre les idées noires au moment où le langage poétique sort de ses velléités pour devenir du langage le compagnon capricieux de l’épreuve du temps ?
Aux figures marmoréennes fidèles au genre font place d’autres images qui lui correspondent tout autant : la volute, le mouvement. En conséquence, loin des stucs et autres placages, la « poésie baroque » atteint une précision impressionnante tant elle est le fruit d’un travail continuel. Il permet au discours de se poursuivre contre la « déflagration du silence » qui tente de la décimer. Quelques versets suffisent à jeter le trouble sur le quotidien selon des bourrasques contre ce qui se voudrait immuable.
De fait Bauer ne cesse de célébrer le monde et la vie de manière biaisée : la où « dans la nef en péril » les voix sont écumantes, la cérémonie liturgique du poème suit son cours en ode à la vie ou à son peu qu’elle est lorsqu’elle clapote en certains bassins que le poète réanime. A la mort baroque fait face une vie plus « classique ». Le tout dans une ironie en torsades. Elle incurve l’immobilité des marbres en coupant la voix aux miserere de divers « énoncés » dont ils se veulent l’écho.