"Mytho" saison 2, la splendeur des Renan-Sam par Géraldine Geay
Qu’on nous engueule parce qu’on s’émerveille de tout, ou qu’on nous le reproche avec un accent doux, mince différence. La mode dira que dans la saison 2 de Mytho il est question d’emprise. Que disait-on du temps du film d’Orson Welles La splendeur des Amberson, où la manipulation n’oubliait bien sûr jamais d’avoir du panache, et de diversifier ses formes ?
Ici, le jeune manipulateur, le jeune Amberson s’appelle Renan, n’a pas le pouvoir sur tous les personnages (surtout pas sur la jeune Virginie), ne tient pas tout le récit, n’est pas maté à la fin (éphémèrement maté au milieu), fait partie d’une ribambelle de personnages qui n’ont pas la conscience bien nette mais ont plus ou moins, et plus ou moins constamment, la capacité de jouer la comédie. Le ressort principal, plus astucieux que vraiment immoral, de la saison 1 (une mère de famille délaissée laisse son mari et ses enfants croire qu’elle a une tumeur), s’est évaporé. Une vérité, rétablie, libère le récit de la saison 2.
Sam, le fils, s’émerveille donc de ce nouveau personnage, menteur hors de sa famille, khâgneux imbu aspirant écrivain, hétéro sur les réseaux, homo avec lui, et qui ne cesse de le reprendre à propos de littérature. Lorsqu’on croit l’écriture de la série à charge contre ce Renan, on découvre une cause (« rebelle avec une cause ») de tout son cirque, et surtout le mélange de jalousie et de mépris envers Sam, Sam le libre-sans-théorie. Renan est véritablement un personnage secondaire de la série, il est sur le bord, annexe au clan, et c’est à cette place bizarre que ses vérités idiotes (« On ne demande jamais à un écrivain de lire son manuscrit, ça ne se fait pas ! ») deviennent des points de cristallisation poétique. Rôdeur pas si menaçant, personnage dont on ignore les qualités, disons « les faits », dont on ne lira pas une ligne, il hérite de l’admiration et de l’amour de Sam, qui n’étudie pas la littérature mais bouquine Rimbaud pour être aimé.
Au fond, peu importe que Renan ait ou non du talent pour l’écriture ou pour le mensonge, ou la gueule faite pour mentir. Il ne fera pas tout couler. Dans La splendeur des Amberson, il y avait cet ingénieur émerveillé de mettre en route sa première automobile, et qui déclarait avoir auparavant été poète. Il faudrait que je revoie le film pour savoir si son entourage était taquin, sévère ou admiratif, mais Renan dans Mytho est, lui, romancier plus suspect qu’un poète. Et l’émerveillement de Sam est sévère.