16 oct.
2007
Holocauste de Reznikoff par Nicole Caligaris
Second volet d'un long travail sur les archives de tribunaux (cf Témoignage), Reznikoff donne, à partir des minutes des procès de Nuremberg, un texte qui porte il me semble toutes les questions littéraires qui tiennent entre le siècle n° 20 que nous devrions pouvoir lâcher avec soulagement et le siècle n° 21 que nous ne pouvons qu'aborder avec crainte. Holocauste, boucle logique fascinante, est un poème à la fois recopié, à la fois écrit.
La copie, service sacré, amour absolu du premier texte - et le texte premier d'Holocauste, ce sont les paroles des témoins de la déportation, du génocide - la copie fait de l'auteur un disparu.
Cependant, avec comme vocabulaire, à la place de mots, des récits, Reznikoff écrit et puissamment : il rythme, il associe, il construit, il anonyme, surtout, d'une périphrase, chaque témoin ; et c'est comme ça, copiste effaçant la particularité de ses textes, les dérobant à leur origine, les fondant tous dans une même bouche, c'est comme ça qu'il fait entendre cette voix collective, qu'il fait entendre, d'un chœur qui nous comprend, qui est nous, le chant possible d'après le désastre.
Avec Une voix dans le chœur (1966-1971), le soviétique André Siniavski alias Abram Tertz, avait saisi, de la Sosnovska où il avait été mis au frais, dans les lettres à sa femme qu'il tissait de "brèves du camp", la commotion de ces paroles prononcées par on ne sait qui, qu'importe qui, paroles prononcées tout court, répliques-poèmes toujours splendides du chœur des hommes sans nom qui disparaissent au moment où ils parlent.
Le talent du poète loge, c'est connu, dans le conduit de son oreille.
La copie, service sacré, amour absolu du premier texte - et le texte premier d'Holocauste, ce sont les paroles des témoins de la déportation, du génocide - la copie fait de l'auteur un disparu.
Cependant, avec comme vocabulaire, à la place de mots, des récits, Reznikoff écrit et puissamment : il rythme, il associe, il construit, il anonyme, surtout, d'une périphrase, chaque témoin ; et c'est comme ça, copiste effaçant la particularité de ses textes, les dérobant à leur origine, les fondant tous dans une même bouche, c'est comme ça qu'il fait entendre cette voix collective, qu'il fait entendre, d'un chœur qui nous comprend, qui est nous, le chant possible d'après le désastre.
Avec Une voix dans le chœur (1966-1971), le soviétique André Siniavski alias Abram Tertz, avait saisi, de la Sosnovska où il avait été mis au frais, dans les lettres à sa femme qu'il tissait de "brèves du camp", la commotion de ces paroles prononcées par on ne sait qui, qu'importe qui, paroles prononcées tout court, répliques-poèmes toujours splendides du chœur des hommes sans nom qui disparaissent au moment où ils parlent.
Le talent du poète loge, c'est connu, dans le conduit de son oreille.