10 juin
2007
12 Sœurs Slovaques de Sonia Chiambretto par Nathalie Quintane
Il y a peu de livres de Sonia Chiambretto qui ne soient, si l'on y pense, à se pendre sous un platane un soir de 31 décembre. Mais ça, c'est l'intrigue, le "speech" de quelque chose qui n'est pas de l'ordre du récit mais consisterait plutôt en ponctions narratives qui ne cherchent à reconstituer nul ordre. Ainsi, le texte a l'élégance d'une langue qui fouette, à tous les sens du terme (tenue par un mélange indiscernable de peur et d'humour distanciant). C'était particulièrement le cas pour Chto, ici remarquablement recensé par Guillaume Fayard. On retrouve, dans 12 Soeurs Slovaques, cette verticalité à coups de serpe où la parole est prise :
En meute/les frères rentrent/sur leur dos/COUVERTURE/TENTE/GOURDE.
On sent bien qu'il y a eu là, avant cette architecture, un vaste chantier : on voit les phrases des sœurs cassées et reconstruites de fond en comble, on voit la violence du processus à l'œuvre, et pourtant quelque chose - chose à laquelle peu d'écrivains parviennent à s'affronter, lorsqu'ils y songent - est tenu et restitué : la monnaie avec laquelle ces sœurs ont payé la vie qu'on leur a faite, la naïveté incurable d'une enfance de force, d'un côté, et de l'autre, comme un envers noué, la cruauté qu'elle en renvoie :
Sœur Monique ma Supérieure une Soeur de la Charité a bon cœur Sœur Monique ma Supérieure une Sœur de la Charité ne nous le manifeste pas (...).
C'est peu de dire que les textes de Chiambretto rendent justice à la parole de ceux qu'on préfère ne pas entendre. C'est peu de dire et c'est mal dire, car l'écrivain n'a pas choisi cet "angle"-là (celui de la morale appliquée, du devoir de témoigner, etc) : elle a voulu une langue juste, ajustée au plus près, une langue qui ne fasse pas de cadeau et qui en fasse plein, simultanément : on ne peut pas ne pas sourire (voire rire) à ces histoires de chaussettes, de "petites nouvelles", à ce personnage de sœur acariâtre et suisse. La mise en scène d'Hubert Colas, en octobre 2006 (Montévidéo, Marseille) tenait cet équilibre délicat entre humour et drame. Tout ce qu'on peut souhaiter à ce texte, c'est de vivre largement, sur scène ou ailleurs, sans sulpicianisme, avec la méchanceté drôle qui est sa marque.
En meute/les frères rentrent/sur leur dos/COUVERTURE/TENTE/GOURDE.
On sent bien qu'il y a eu là, avant cette architecture, un vaste chantier : on voit les phrases des sœurs cassées et reconstruites de fond en comble, on voit la violence du processus à l'œuvre, et pourtant quelque chose - chose à laquelle peu d'écrivains parviennent à s'affronter, lorsqu'ils y songent - est tenu et restitué : la monnaie avec laquelle ces sœurs ont payé la vie qu'on leur a faite, la naïveté incurable d'une enfance de force, d'un côté, et de l'autre, comme un envers noué, la cruauté qu'elle en renvoie :
Sœur Monique ma Supérieure une Soeur de la Charité a bon cœur Sœur Monique ma Supérieure une Sœur de la Charité ne nous le manifeste pas (...).
C'est peu de dire que les textes de Chiambretto rendent justice à la parole de ceux qu'on préfère ne pas entendre. C'est peu de dire et c'est mal dire, car l'écrivain n'a pas choisi cet "angle"-là (celui de la morale appliquée, du devoir de témoigner, etc) : elle a voulu une langue juste, ajustée au plus près, une langue qui ne fasse pas de cadeau et qui en fasse plein, simultanément : on ne peut pas ne pas sourire (voire rire) à ces histoires de chaussettes, de "petites nouvelles", à ce personnage de sœur acariâtre et suisse. La mise en scène d'Hubert Colas, en octobre 2006 (Montévidéo, Marseille) tenait cet équilibre délicat entre humour et drame. Tout ce qu'on peut souhaiter à ce texte, c'est de vivre largement, sur scène ou ailleurs, sans sulpicianisme, avec la méchanceté drôle qui est sa marque.