18 nov.
2007
Monospace d'Anne Parian par Nathalie Quintane
Monospace conçoit, présente, accompagne le poète, le livre et le lecteur dans un jardin - ou la photographie d'un jardin photographié par Bonnard, plus que l'hortus conclusus édénique ou le jardin d'amour allégorique du Roman de la Rose, même si le lecteur est bien cette sorte d'amant qu'on ne rencontre pas.
Il s'agit bien de décrire au plus près un parcours, et non de proposer une définition de la poésie, ni même de dire ce qu'elle peut. Le pas semble assuré, mais on ne délivrera ici aucune proposition gnomique, ni même quasi - la poésie peut penser sans exposer (et encore moins exhiber) sa pensée, c'est la première des élégances, et ce livre est d'une élégance rare, singulièrement dans un "champ" parfois un peu trop pris en otage par ses philosophants.
" Oui, mais de quoi s'agit-il ? " : il n'y aura donc pas de réponse à cette question posée page 16; ceux qui ont besoin de mises au point passeront leur chemin. " Le décor prend forme avec l'ambition de le décrire seulement/si plat " : c'est suffisamment dit, non ?
Si le/a poète pose en méticuleuse magicienne, voire en ordonnatrice de nos plaisirs visuels et des siens (" Voyez ce que je cherche./ J'en dispose des modèles selon mes caprices."), il ne faut pas s'y tromper : elle entretient avec elle-même une distance sans teinte (de mélancolie ni de joie), cette distance que lui permet le carré, choisi parce qu'il est "la forme la plus objective d'un plan (...) il produit un froid mortel, et ce n'est pas un hasard si j'en multiplie les usages."
Il n'y a, en réalité, nulle part où s'agacer d'un ton qu'on pourrait, à la première lecture, juger "classique" un peu vite, puisque l'un des enjeux du livre est justement de repenser, ou plutôt replacer ce classicisme en nous (le "classicisme" d'un Mallarmé, par exemple). Ainsi, le texte décrit " sous une liste d'apparitions bâclées/les stridulations de cigales au passage/l'hypothèse d'un champ polychrome/classique sur aggloméré ". Surtout, à la fin, l'ordonnatrice en rabat : " c'est en vain (...) tu me vois sans ressources", et le subjonctif terminal laisse peu d'espoir quant à une quelconque certitude installée : " Je sais qu'il y eût/aménagé des jardins/merveilleux ".
Il n'en reste pas moins, dans Monospace, une crise dont on entend encore la foi : " L'élévation idéale le reste, malgré l'effet sonore particulier de ce qui empire." (page 46). Qu'est-ce qui empire ? L'empirie, peut-on supposer - ou les réalités de l'empire. Les occurences, nombreuses, d'un lexique très marqué (idéal 7 x, idéalité 1 x, idée 10 x, comme l'index l'indique en le mettant à distance, il est vrai) ne me semblent pas là que pour faire sursauter le lecteur du XXIe siècle. Monospace se livre comme l'exercice d'une fidélité, du moins, sous le papier crème de la collection poésie de P.O.L.
Il s'agit bien de décrire au plus près un parcours, et non de proposer une définition de la poésie, ni même de dire ce qu'elle peut. Le pas semble assuré, mais on ne délivrera ici aucune proposition gnomique, ni même quasi - la poésie peut penser sans exposer (et encore moins exhiber) sa pensée, c'est la première des élégances, et ce livre est d'une élégance rare, singulièrement dans un "champ" parfois un peu trop pris en otage par ses philosophants.
" Oui, mais de quoi s'agit-il ? " : il n'y aura donc pas de réponse à cette question posée page 16; ceux qui ont besoin de mises au point passeront leur chemin. " Le décor prend forme avec l'ambition de le décrire seulement/si plat " : c'est suffisamment dit, non ?
Si le/a poète pose en méticuleuse magicienne, voire en ordonnatrice de nos plaisirs visuels et des siens (" Voyez ce que je cherche./ J'en dispose des modèles selon mes caprices."), il ne faut pas s'y tromper : elle entretient avec elle-même une distance sans teinte (de mélancolie ni de joie), cette distance que lui permet le carré, choisi parce qu'il est "la forme la plus objective d'un plan (...) il produit un froid mortel, et ce n'est pas un hasard si j'en multiplie les usages."
Il n'y a, en réalité, nulle part où s'agacer d'un ton qu'on pourrait, à la première lecture, juger "classique" un peu vite, puisque l'un des enjeux du livre est justement de repenser, ou plutôt replacer ce classicisme en nous (le "classicisme" d'un Mallarmé, par exemple). Ainsi, le texte décrit " sous une liste d'apparitions bâclées/les stridulations de cigales au passage/l'hypothèse d'un champ polychrome/classique sur aggloméré ". Surtout, à la fin, l'ordonnatrice en rabat : " c'est en vain (...) tu me vois sans ressources", et le subjonctif terminal laisse peu d'espoir quant à une quelconque certitude installée : " Je sais qu'il y eût/aménagé des jardins/merveilleux ".
Il n'en reste pas moins, dans Monospace, une crise dont on entend encore la foi : " L'élévation idéale le reste, malgré l'effet sonore particulier de ce qui empire." (page 46). Qu'est-ce qui empire ? L'empirie, peut-on supposer - ou les réalités de l'empire. Les occurences, nombreuses, d'un lexique très marqué (idéal 7 x, idéalité 1 x, idée 10 x, comme l'index l'indique en le mettant à distance, il est vrai) ne me semblent pas là que pour faire sursauter le lecteur du XXIe siècle. Monospace se livre comme l'exercice d'une fidélité, du moins, sous le papier crème de la collection poésie de P.O.L.