Guillaume Basquin, L’Histoire splendide par Claude Minière
Un livre pour enfants du XXI° siècle. Comme James Joyce inscrivait Lucia dans son sillage, Guillaume Basquin dédie son thésaurus à « l’élue souveraine et à ses enfants ». Dans la dernière longueur du Finnegans Wake, Joyce écrivait : « Carry me along, taddy, like you done through the toy fair ! » Et Basquin, en introduction (p. 39) de L’Histoire splendide: « qu’est-ce qui fait 999 fois clic-clic & une fois clac me demande ma plus jeune fille Ninon ? » Naissance par l’oreille.
Mais depuis 1939, l’Histoire s’est encore enrichie, ou alourdie, ou fumée d’actes et de formules politiques, scientifiques, littéraires. De drames. Un sens ? Ce n’est pas certain. S’est déposée en tout cas une masse d’expériences, jusqu’à celle des fake news et du Coronavirus. Alors se pose à nouveau la question des livres et du Livre (Guillaume Basquin est l’auteur du (L)ivre de papier, paru en 2016).
Mallarmé, dans une « époque de transition », mettait à l’abri dans le Livre ses poèmes qu’il retirait de la circulation générale ; pour Anatole son fils il mettait en chantier un Tombeau. Et Guillaume L. Basquin, fils de Marc ? Il dépose composés dans L’Histoire splendide (titre emprunté à Rimbaud annonçant un projet de feuilleton) cinq « livres » et un épilogue, chacun ayant sa tonalité particulière. Quand vous en êtes à la question du livre (nous y sommes, et aussi, crucialement aujourd’hui, quant à l’avenir de l’édition), deux voies semblent s’offrir, celle de l’épure et celle du thésaurus. Basquin a opté pour le livre-somme, la compilation, où son tempérament libertaire fait feu de toutes boissons (avec deux millésimes de choix : la Terreur révolutionnaire et la crise du Coronavirus). S’isole-t-il ? Page 142 : « l’île est comme un tapis de terre volant en silence – mais où atterrir ? »
L’ouvrage de Guillaume Basquin procède par montage de « coupes ». La coupe est pleine ? Souhaite-t-il parfois qu’elle soit de lui éloignée comme le demanda le Christ ? Nous sommes souvent emportés par sa verve, à quelques moments peut nous prendre le sentiment de contempler un champ de ruines plus que l’hourra (Hopkins) des moissonneurs.