La petite dame, de Valérie Rouzeau par Christophe Stolowicki
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Valérie Rouzeau, née en 1967, a été rendue célèbre par son livre de deuil (de père) Pas revoir, paru en 1999. Son extrême simplicité, tenue à bout de bras d’une érudition étendue, est d’une authentique poète qui, exceptionnellement parmi les poètes, a pu faire carrière, tout en restant pauvre, soit sympathique.
Un quart de siècle après, le retour d’âge ne lui étant pas épargné, la voici interpelée comme la petite dame, par un de ses commerçants on imagine, son intériorité à toutes mains devant composer avec cette malséante image. Quand les mots dont elle a fait sa provende lui sont retournés au visage, entre Valérie, Valérie Rouzeau et la petite dame, un débat s’engage. Tout lui est gage, tout l’encage.
« Elle a du mal avec maintenant mais pas toujours / Parfois c’est mieux qu’avant / Pour un peu elle croirait au futur. »
Valérie Rouzeau, son plein de langue, de la langue plein la bouche, faisant le plein du plein comme dans l’Isa Upanishad, giflée à tour de bras par la petite dame et l’implacable retour sur soi qu’elle commande.
« Chaîne et chienne non mais roman en vers presque »
Familière de métier, trempée de langue comme le fer blanc dans le rouge, cette couleur aristocratique romaine, celle des talons rouges devenue la ligne rouge qu’elle franchit allègrement.
« When I am alone I am happy / Dit William Carlos à Valérie / Qui lui répond tout de go moi aussi », poète de son métier et de sa profession d’il était une fois.
« Who rules the waves ? Qui roule les vagues ? » La vie à contresens.
Une seule rime par poème, de préférence approximative, dit tout l’art pauvre des Riches Heures d’une contemporaine.
« C’est comme si elle avait perdu la ligne de sa vie / C’est comme si elle avait perdu la ligne / C’est comme si elle avait perdu / C’est comme si / C’est comme / C’est ». Il faut, comme Sade, la prendre à la lettre non au mot.
« Nullipares nous n’irions nulle part ? » Oui, nullipare elle l’a emprunté, à qui elle l’avoue en Notes de fin d’ouvrage. Il n’est pas besoin de faire un dessin à une poète de ne pas encombrer la planète.
Valérie Rouzeau, un non-art viscéral de l’abréviation.