Les Immaudits de Géraldine Geay par Christian Désagulier
Scripts
caminante, no hay camino,
se hace camino al andar (Antonio Machado)
cheminant par quel chemin (il n'y a pas de chemin),
(se fait) chemin faisant en marchant (à/au marcher)
Voici qu'une poète qui écrit des poèmes d'aujourd'hui s'avance à dire. Géraldine Geay raconte des histoires en vers où nous figurons, c’est à dire qu’elle ne raconte pas d’histoires..
Elle raconte ce que l’on voit et entend à travers, les élancements des pierres et les entailles à sans qui poissent en raboutant les morceaux : poète qui poème, historise sans hystériser..
Une meilleure actrice eût pu te sauver
Á te donner des joies
Et demain te les devoir encore
Á te simuler ce qu'elle improvisa
Et ne demander que tes deux yeux
Il me faudra des Histoires
Pour t'offrir un nouveau, ainsi que le pétrole
Dont chaque baril connut les premiers hommes
Et ne brûle qu'un quart d'hiver.
(Mauvaise actrice)
Qu'elle arrache des murs en marchant dessous l’échelle, nous défense de de se défendre contre ce qui dans la bouche pâteuse : recueille la colle pour les affiches pendant la nuit que la salle est vide - que les trains font valser les marchandises en allant à la ligne..
Les visions solitaires se maintiennent
Mieux défendues, sauf dites
Comme un réel voulu
Usent, ou les user
En wagons, les locos
(Les visions solitaires)
Ce n'est pas du cinéma, c'est du cinéma : des rails disjoints, abrasés au passage des roues pour les mots, des wagons d'images trouées, loca la camera..
Voici qu’à la place d’arracher, nous cueillons les fruits des murs par les tiges au suint d'acide formique : c’est à dire des poèmes dont la forme ne laisse pas la peau des yeux indifférente, exacerbe les tympans - démange l'en dessous des mains..
De chimiques histoires telles que s'en racontent les pommiers pour nous faire marcher contre le vent, nous agenouillent de licorne à se défendre d'en manger - nous tombe jusqu'à, jusqu'à mettre les mots dans la gorge, jusque..
Elle m'avait à l'attache, ma muse
Elle avait mon écrire en otage
Un bébé qui tombait si je tirais sur elle
Et des doigts capables de l'étouffer
Il a fallu que je la charme
Et lui fasse des rêves
Et l'endorme quand il fut dans mes bras
Il grandit. Elle est morte.
Elle dépendait de lui
J'ai eu peur
Il aura d'autres mères.
(Décollement)
Nous avions faim de nombreux jours sans ravitaillement, nous étions prêts à nous manger les mains, tout l'en dessous raclé. Quand les nuits ne cessent pas de tomber, qu'elles shuntent le transformateur et vous prive d'ipséité voici qu'à nouveau on peut lire à la lumière des soupirs de l’autre..
Nous étions à l'abri et l'on peut enfin se mettre en danger, arpenter les rues en marelle, un caillou de moi dans la main, l'autre dans la chaussure : chaque bond occupe la conscience..
Poèmes où les pieds se prennent dans les fils de mines, cheminant..