Hantaï ne se prononce pas entaille. par Christian Désagulier
Ce sont des toiles qui seraient plutôt des tampons de chiffon froissés, repassés et tendus après qu'ils furent appliqués sur des hémorragies de toutes les couleurs, de sang jaune serin, bleu d’Hongrie, ultra vert, violet crépusculaire, quelquefois carrément rouge.
Des pansements de draps en lin dont les déchirements rectilignes, les geignements continus ont suivi les fils de chaîne et de trame du taffetas aux diagonales infrangibles.
L'armure malgré ses défauts et sa capacité d'absorption chromatophyle demeurerait miraculeusement blanche.
Des sommes de signes plus, des alignements fixes de croix confèrent ce moiré au tissu quadrangulaire en équilibre, isotrope, quand les couleurs se mettent à pulser, quand la longueur de leurs ondes résonnent avec la fréquence empirique des déplis.
Car le peintre bouge beaucoup dans son sommeil d'où cette enharmonique agitation que le tableau restitue.
Il ne faut toutefois pas qu'il se réveille pendant la descente tandis que l'on refait son lit, la tête posée sur une épaule familière comme quand on tient précautionneusement un enfant endormi, serré contre soi en tablier bleu réminiscent pour qu'il poursuive son rêve.
Ce qu'il marmotte à notre oreille depuis le fond de ses pensées devient alors paroles d'évangile.